
Procédure prud’homale : seule comptent les griefs compris dans la lettre de licenciement !

La règle posée par l’article L.1235-2 du Code du travail est connue : la lettre de licenciement fixe les limites du litige en ce qui concerne les motifs de licenciement.
Par exemple : un employeur qui vous licencie au motif que vous vous êtes battu sur votre lieu de travail ne pourra pas arguer en justice au soutien de sa mesure qu’il vous a également licencié parce que vous étiez régulièrement en retard. Ce dernier argument invoqué pour la première fois en justice ne figurant pas dans la lettre qu’il vous a notifiée, il sera rejeté par le juge.
C’est de la situation symétriquement inverse qu’avait à connaitre la Cour de cassation dans un arrêt récent (Cass. soc., 23 oct. 2024, n° 22-22.206).
Un salarié avait été licencié pour faute grave. Sa lettre de licenciement comprenait quatre motifs (l'utilisation à des fins personnelles du véhicule de service, le fait d'avoir consenti des prestations gratuites à des clients de l'entreprise, des malfaçons sur des chantiers et la tardiveté dans l'établissement des procès-verbaux de chantiers et la circulation de rumeurs mensongères sur l'entreprise dans l'intention de nuire à l'employeur).
Ce salarieì avait contesté son licenciement devant le Conseil de prud’hommes.
Or, son ancien employeur n’avait pas justifié en justice du bienfondé du quatrième grief pourtant invoqué dans sa lettre de licenciement – le motif tiré de la circulation de rumeurs mensongères sur l'entreprise.
La Cour d’appel n’a donc pas examiné ce grief et a jugé le licenciement comme dépourvu de cause réelle et sérieuse.
La question soumise à la Cour de cassation était donc celle de savoir si le juge devait malgré tout examiner ce motif, qui figurait dans la lettre de licenciement, mais dont le bienfondé n’était pas justifié devant lui dans les conclusions de l’employeur.
La Haute Juridiction a très logiquement répondu par la positive.
Elle a ainsi confirmé que le juge avait l’obligation d’examiner l’ensemble des griefs invoqués dans la lettre de licenciement. Peu importait donc que l’employeur ne l’ait pas évoqué dans ses conclusions.
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Parité femmes-hommes : même les listes incomplètes doivent la respecter
La Cour de cassation a rendu, le 1er octobre 2025, un arrêt important pour les élections professionnelles : même une liste syndicale incomplète doit respecter la parité femmes-hommes (Cass. soc.,n° 24-60.189).
Lors des élections du CSE, la CFDT avait présenté une liste comportant uniquement deux candidats hommes, alors que le collège électoral comptait 41,67% de femmes et 58,33 % d’hommes. Ces deux candidats ont été élus dès le premier tour. Une candidate d’un autre syndicat a contesté l’élection, estimant que la règle de proportionnalité n’avait pas été respectée.
Le tribunal judiciaire avait validé les résultats. Mais la Cour de cassation a annulé l’élection : même une liste incomplète doit refléter la proportion femmes-hommes du collège électoral, conformément aux articles L.2314-30 etL.2314-32 du Code du travail.
En pratique :
• Une liste incomplète est autorisée, mais elle doit respecter la proportion femmes-hommes.
• Si la proportion n’est pas respectée, les élus du sexe surreprésenté verront leur élection annulée.
➡️ À retenir : la parité n’est pas une option, même pour une liste incomplète. Les syndicats doivent donc composer leurs candidatures avec une vigilance accrue.


Télétravail et tickets restaurant : l’égalité enfin confirmée
Les salariés en télétravail ont-ils droitaux tickets restaurant ? La question a longtemps divisé les entreprises. Maisla Cour de cassation a tranché le 8 octobre 2025 : oui, les télétravailleursdoivent bénéficier du même avantage que leurs collègues sur site (Cass. soc.,n° 24-12.373).
M. G., salarié en télétravail entre 2020 et 2022, ne recevait plus detitres-restaurant. Il a saisi les prud’hommes, qui lui ont donné raison.L’employeur a contesté, sans succès : la Cour de cassation a confirmé la décision.
L’article L.1222-9 du Code du travail prévoit que le télétravailleur disposedes mêmes droits que le salarié présent dans l’entreprise. Et selon lesarticles L.3262-1 et R.3262-7, la seule condition pour bénéficier de ticketsrestaurant est que le repas soit compris dans la journée de travail.
En clair : travailler à distance ne retire pas le droit à cet avantage.
Ce qu’il faut retenir :
• Le télétravail ne doit pas réduire les droits des salariés.
• Les avantages du travail sur site (comme les tickets restaurant) s’appliquentaussi au télétravail.
• Un refus de l’employeur constitue une inégalité de traitement.
➡️ À retenir : télétravailler ne change rien à vos droits, ni à votre pausedéjeuner !


Transaction en droit du travail : un délai de 5 ans pour contester
Quand un conflit entre un salarié et son employeur se termine par une transaction, on pense souvent que tout est définitivement réglé. Pourtant, la Cour de cassation vient de rappeler que la porte n’est pas totalement fermée : le salarié dispose de cinq ans pour contester cette transaction, et non deux comme on le croyait parfois (Cass.soc., 8 oct. 2025, n° 23-23.501).
La transaction est un accord amiable par lequel salarié et employeur mettent fin à un différend, souvent en échange d’une somme d’argent. En signant, le salarié déclare être satisfait et renonce à toute autre réclamation.
Mme N., employée de Pôle emploi (devenu France Travail), signe une transaction en 2015. Trois ans plus tard, elle saisit les prud’hommes pour l’annuler, estimant avoir subi un harcèlement moral. La cour d’appel rejette sa demande, jugeant qu’elle est prescrite : pour elle, le délai est de deux ans. Mais laCour de cassation n’est pas du même avis.
Les juges expliquent que la contestation d’une transaction ne relève pas du contrat de travail, mais du droit civil, puisqu’il s’agit d’évaluer la validité d’un accord. Elle obéit donc au délai de prescription de cinq ans prévu par le Code civil.
Concrètement :
• Action liée au contrat de travail (licenciement, salaire impayé…) → 2 ans (Code du travail)
• Action portant sur la transaction (annulation de l’accord signé) → 5 ans (Code civil)
➡️ À retenir : une transaction peut être contestée pendant cinq ans si lesalarié estime qu’elle a été signée sous pression, par erreur ou dans des conditions irrégulières.

