Victimes de racisme : les juges vous entendent !

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Il n'est pas rare que des salariés discriminés se désolent du caractère indémontrable des agissements qu'ils subissent. Et pour cause : la discrimination – et plus encore, la discrimination en raison de l’origine – sévit dans l'opacité.

L'article L. 1134-1 du Code du travail vient à la rescousse de ces salariés en disposant que devant un juge, ces derniers n'ont qu'à présenter des éléments laissant supposer l'existence d'une discrimination – et non des faits démontrant intégralement la discrimination. Pour se défendre de ces agissements, l’employeur devra prouver que les éléments reposent sur des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

Dans une affaire récente, un salarié avait dénoncé à son employeur des propos racistes répétés de ses supérieurs, une attitude discriminatoire, et, notamment le refus de l’un d’eux de le saluer.

Estimant ces agissements discriminatoires, il avait pris acte de la rupture de son contrat et saisi les prud’hommes pour faire reconnaître par les juges cette démission comme un licenciement nul – avec toutes les conséquences indemnitaires qui s’ensuivent

La Cour d’appel avait jugé que le salarié n’avait pas démontré avoir subi de mesure discriminatoire.

La Cour de cassation a sorti son stylo rouge et a censuré cette décision (Cass. soc., 14 nov. 2024, n° 23-17.917), jugeant que les faits rapportés étaient autant d'indices laissant supposer l'existence d'une discrimination liée à son origine.

Cet arrêt a le mérite de rappeler aux salariés qu'en matière de discrimination, la charge de la preuve ne repose pas entièrement sur eux !

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Titres-restaurant : une activité sociale et culturelle ? Oui… et avec un chèque à la clé !

Ce n’est pas une blague : les titres-restaurant peuvent bel et bien relever des activités sociales et culturelles (ASC) du CSE.

Et ce n’est pas nous qui le disons, mais la cour d’appel de Versailles, dans une décision du 27 février 2025.

🍽️ L’affaire : la fin des titres…mais pas des histoires

Dans une entreprise, l’employeur décide un jour d’arrêter de distribuer les titres-restaurant.
Le CSE ne bronche pas. Il réagit plutôt finement :
→ « Très bien. Puisqu’il s’agit d’une activité sociale et culturelle, c’est à nous de la gérer. »

L’employeur accepte de céder la gestion, mais refuse de transférer les fonds correspondants.

Résultat : contentieux judiciaire.
Et à l’arrivée ? Victoire du CSE.

⚖️ Pourquoi?

Parce que :
- L’entreprise avait une cantine. Donc les titres-restaurant n’étaient pas obligatoires.
- Et selon la jurisprudence, une activité sociale et culturelle doit :
 1. Être facultative,
 2. Profiter aux salariés,
 3. Être sans discrimination,
 4. Améliorer les conditions de vie au travail,
 5. Ne pas constituer une rémunération.

Les titres-restaurant cochent toutes les cases.
Donc : le CSE peut les gérer, et surtout demander le financement correspondant.

💰 Ce que dit le Code du travail


L’article L.2312-81 prévoit que lorsque l’employeur gérait une ASC, et qu’elle est reprise par le CSE :
- Une contribution financière doit être versée,
- Et cette somme ne peut être inférieure à celle de l’année précédente, sauf accord contraire.

✅ Ce qu’il faut retenir


- Les titres-restaurant peuvent être qualifiés d’ASC s’ils ne sont pas imposés par la loi.
- Si l’employeur cesse de les distribuer, le CSE peut en reprendre la gestion.
- L’employeur doit alors verser une subvention couvrant les économies faites.

🎯Conclusion pratique :

Le titre-restaurant, ce n’est pas qu’un ticket pour déjeuner. C’est aussi un levier juridique et financier pour les CSE… à condition de bien maîtriser la notion d’activité sociale et culturelle.

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Élections CSE : répartition des sièges, loyauté… et obligation de trancher

Aujourd’hui, cap sur les élections professionnelles. Un moment stratégique pour les représentants du personnel… et une source inépuisable de litiges !

Avant le vote, l’employeur et les syndicats doivent impérativement se mettre d’accord sur deux choses essentielles :

- la répartition du personnel entre les collèges électoraux (ouvriers/employés, agents de maîtrise/techniciens, cadres);

- la répartition du nombre de sièges à élire dans chaque collège.

Tout cela est formalisé dans le protocole d’accord préélectoral (PAP). Et quand il n’y a pas d’accord ? Ça secomplique...

⚖️ Et si personne ne s’entend ?

Premier cas : un syndicat s’est présenté à la négociation, mais aucun accord n’est signé.
→ L’employeur doit alors saisir la Dreets (ex-Inspection du travail).

Deuxième cas : la Dreets ne répond pas dans les deux mois.
→ C’est alors au juge judiciaire de trancher.

Mais attention : la Dreets peut refuser de se prononcer si elle estime que l’employeur a manqué à son devoir de loyauté(par exemple, en refusant de transmettre les fiches de postes ou les effectifs).

🔎 Un rappel ferme de la Cour de cassation (25 juin 2025)

Dans une affaire récente, l’employeur avait mal joué le jeu. La Dreets est restée silencieuse.
Le juge a alors refusé de statuer, estimant que la négociation avait été biaisée.

Mais la Cour de cassation a cassé cette décision :
→ Peu importe que la négociation ait été imparfaite : le juge doit statuer lorsque la Dreets s’est abstenue.

Même sans toutes les informations, le juge ne peut pas botter en touche. Il peut ordonner à l’employeur de produire les documents manquants… mais il doit trancher.

✅ Ce qu’il faut retenir


- La Dreets peut refuser de statuer si l’employeur n’a pas négocié loyalement.
- Mais le juge ne peut jamais refuser de décider si la Dreets est silencieuse.
- Le juge peut exiger des pièces complémentaires, mais il doit aller au bout.

🎯 Conclusion pratique :

Négocier loyalement le PAP, c’est stratégique. Car si vous bloquez la procédure:

- La Dreets peut vous laisser seul.

- Le juge, lui, vous forcera à jouer cartes sur table.

Obligations légales
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Maladie pendant les congés payés : vers la fin d’une exception française ?

Aujourd’hui, on s’intéresse à une règle qui pourrait bien changer… et qui concerne beaucoup de salariés : que se passe-t-il lorsqu’un salarié tombe malade pendant ses congés payés ?

Une position française… en décalage

Jusqu’ici, la position du droit français était nette – mais sévère :

  • Tomber malade pendant ses vacances ? Tant pis : les congés sont considérés comme pris.
  • Le salarié ne peut ni reporter, ni prolonger ses congés.
  • Il perçoit l’indemnité de congés payés (et éventuellement les IJSS), mais pas le complément employeur.

Autrement dit, la maladie tombe mal… et ne change rien au décompte des jours de repos.

Sauf que l’Union européenne ne voit pas les choses de cette façon.

La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a rappelé une distinction fondamentale :

Le congé payé vise à se reposer,
l’arrêt maladie vise à se soigner.

Et donc, si un salarié tombe malade pendant ses congés, il doit pouvoir récupérer les jours qu’il n’a pas pu consacrer au repos.

C’est une conception protectrice, déjà suivie par plusieurs juridictions nationales. En France, la cour d’appel de Versailles l’a appliquée dès 2022, en reconnaissant à un salarié le droit au report de ses congés non pris en raison de sa maladie.

Mise en demeure de la France (juin 2025)

La Commission européenne a décidé de hausser le ton.
Elle a mis en demeure la France de modifier sa législation, considérée comme contraire au droit européen.

Elle laisse jusqu’au 18 août 2025 pour réagir. Passé ce délai, une procédure contentieuse pourrait être engagée.

Que faire pour les employeurs ?

Le droit français n’a pas encore changé, mais la prudence s’impose :

  • Le ministère du Travail recommande d’ores et déjà d’appliquer la règle européenne.
  • Concrètement : accepter de reporter les congés payés si le salarié présente un arrêt maladie couvrant la période.

C’est un choix stratégique, qui vise à prévenir les contentieux prud’homaux à venir.

Ce qu’il faut retenir

  • Un salarié malade pendant ses congés a droit au report de ses jours non pris, selon le droit européen.
  • Le droit français doit évoluer rapidement.
  • En attendant, les employeurs ont tout intérêt à anticiper ce changement pour éviter d’être sanctionnés.

De nouvelles règles à venir, donc. Et une bonne occasion, pour les représentants du personnel, de rappeler que le droit au repos… n’est pas négociable.