On ne peut plus tout dire… (Et c’est sans doute mieux comme ça)

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Dans un arrêt du 12 juin 2024 (cass. soc., 12 juin 2024, n° 23-14.292), la Cour de cassation a rappelé qu’un employeur pouvait sanctionner des propos sexistes… y compris si ces comportements avaient été tolérés par le passé.

Un salarié avait été licencié pour avoir tenu des propos dégradants envers ses collègues, dont voici les exemples les plus fleuris : « t’as une belle chatte », « tu es une partouzeuse », « toi t’aimes les femmes ».

Il avait alors contesté la validité de son licenciement en justice.

La Cour d’appel lui avait donné raison. Elle avait estimé que son employeur ayant toléré de tels agissements par le passé, ne pouvait invoquer une faute grave du salarié.

La Cour de cassation a censuré cette décision, soulignant l’obligation de l’employeur de protéger les salariés contre les agissements sexistes et dégradants.

La tolérance antérieure de l’employeur ne saurait empêcher la sanction ultérieure d’un tel comportement.

Sexistes un jour, mais pas sexistes toujours.

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Titres-restaurant : une activité sociale et culturelle ? Oui… et avec un chèque à la clé !

Ce n’est pas une blague : les titres-restaurant peuvent bel et bien relever des activités sociales et culturelles (ASC) du CSE.

Et ce n’est pas nous qui le disons, mais la cour d’appel de Versailles, dans une décision du 27 février 2025.

🍽️ L’affaire : la fin des titres…mais pas des histoires

Dans une entreprise, l’employeur décide un jour d’arrêter de distribuer les titres-restaurant.
Le CSE ne bronche pas. Il réagit plutôt finement :
→ « Très bien. Puisqu’il s’agit d’une activité sociale et culturelle, c’est à nous de la gérer. »

L’employeur accepte de céder la gestion, mais refuse de transférer les fonds correspondants.

Résultat : contentieux judiciaire.
Et à l’arrivée ? Victoire du CSE.

⚖️ Pourquoi?

Parce que :
- L’entreprise avait une cantine. Donc les titres-restaurant n’étaient pas obligatoires.
- Et selon la jurisprudence, une activité sociale et culturelle doit :
 1. Être facultative,
 2. Profiter aux salariés,
 3. Être sans discrimination,
 4. Améliorer les conditions de vie au travail,
 5. Ne pas constituer une rémunération.

Les titres-restaurant cochent toutes les cases.
Donc : le CSE peut les gérer, et surtout demander le financement correspondant.

💰 Ce que dit le Code du travail


L’article L.2312-81 prévoit que lorsque l’employeur gérait une ASC, et qu’elle est reprise par le CSE :
- Une contribution financière doit être versée,
- Et cette somme ne peut être inférieure à celle de l’année précédente, sauf accord contraire.

✅ Ce qu’il faut retenir


- Les titres-restaurant peuvent être qualifiés d’ASC s’ils ne sont pas imposés par la loi.
- Si l’employeur cesse de les distribuer, le CSE peut en reprendre la gestion.
- L’employeur doit alors verser une subvention couvrant les économies faites.

🎯Conclusion pratique :

Le titre-restaurant, ce n’est pas qu’un ticket pour déjeuner. C’est aussi un levier juridique et financier pour les CSE… à condition de bien maîtriser la notion d’activité sociale et culturelle.

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Élections CSE : répartition des sièges, loyauté… et obligation de trancher

Aujourd’hui, cap sur les élections professionnelles. Un moment stratégique pour les représentants du personnel… et une source inépuisable de litiges !

Avant le vote, l’employeur et les syndicats doivent impérativement se mettre d’accord sur deux choses essentielles :

- la répartition du personnel entre les collèges électoraux (ouvriers/employés, agents de maîtrise/techniciens, cadres);

- la répartition du nombre de sièges à élire dans chaque collège.

Tout cela est formalisé dans le protocole d’accord préélectoral (PAP). Et quand il n’y a pas d’accord ? Ça secomplique...

⚖️ Et si personne ne s’entend ?

Premier cas : un syndicat s’est présenté à la négociation, mais aucun accord n’est signé.
→ L’employeur doit alors saisir la Dreets (ex-Inspection du travail).

Deuxième cas : la Dreets ne répond pas dans les deux mois.
→ C’est alors au juge judiciaire de trancher.

Mais attention : la Dreets peut refuser de se prononcer si elle estime que l’employeur a manqué à son devoir de loyauté(par exemple, en refusant de transmettre les fiches de postes ou les effectifs).

🔎 Un rappel ferme de la Cour de cassation (25 juin 2025)

Dans une affaire récente, l’employeur avait mal joué le jeu. La Dreets est restée silencieuse.
Le juge a alors refusé de statuer, estimant que la négociation avait été biaisée.

Mais la Cour de cassation a cassé cette décision :
→ Peu importe que la négociation ait été imparfaite : le juge doit statuer lorsque la Dreets s’est abstenue.

Même sans toutes les informations, le juge ne peut pas botter en touche. Il peut ordonner à l’employeur de produire les documents manquants… mais il doit trancher.

✅ Ce qu’il faut retenir


- La Dreets peut refuser de statuer si l’employeur n’a pas négocié loyalement.
- Mais le juge ne peut jamais refuser de décider si la Dreets est silencieuse.
- Le juge peut exiger des pièces complémentaires, mais il doit aller au bout.

🎯 Conclusion pratique :

Négocier loyalement le PAP, c’est stratégique. Car si vous bloquez la procédure:

- La Dreets peut vous laisser seul.

- Le juge, lui, vous forcera à jouer cartes sur table.

Obligations légales
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Maladie pendant les congés payés : vers la fin d’une exception française ?

Aujourd’hui, on s’intéresse à une règle qui pourrait bien changer… et qui concerne beaucoup de salariés : que se passe-t-il lorsqu’un salarié tombe malade pendant ses congés payés ?

Une position française… en décalage

Jusqu’ici, la position du droit français était nette – mais sévère :

  • Tomber malade pendant ses vacances ? Tant pis : les congés sont considérés comme pris.
  • Le salarié ne peut ni reporter, ni prolonger ses congés.
  • Il perçoit l’indemnité de congés payés (et éventuellement les IJSS), mais pas le complément employeur.

Autrement dit, la maladie tombe mal… et ne change rien au décompte des jours de repos.

Sauf que l’Union européenne ne voit pas les choses de cette façon.

La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a rappelé une distinction fondamentale :

Le congé payé vise à se reposer,
l’arrêt maladie vise à se soigner.

Et donc, si un salarié tombe malade pendant ses congés, il doit pouvoir récupérer les jours qu’il n’a pas pu consacrer au repos.

C’est une conception protectrice, déjà suivie par plusieurs juridictions nationales. En France, la cour d’appel de Versailles l’a appliquée dès 2022, en reconnaissant à un salarié le droit au report de ses congés non pris en raison de sa maladie.

Mise en demeure de la France (juin 2025)

La Commission européenne a décidé de hausser le ton.
Elle a mis en demeure la France de modifier sa législation, considérée comme contraire au droit européen.

Elle laisse jusqu’au 18 août 2025 pour réagir. Passé ce délai, une procédure contentieuse pourrait être engagée.

Que faire pour les employeurs ?

Le droit français n’a pas encore changé, mais la prudence s’impose :

  • Le ministère du Travail recommande d’ores et déjà d’appliquer la règle européenne.
  • Concrètement : accepter de reporter les congés payés si le salarié présente un arrêt maladie couvrant la période.

C’est un choix stratégique, qui vise à prévenir les contentieux prud’homaux à venir.

Ce qu’il faut retenir

  • Un salarié malade pendant ses congés a droit au report de ses jours non pris, selon le droit européen.
  • Le droit français doit évoluer rapidement.
  • En attendant, les employeurs ont tout intérêt à anticiper ce changement pour éviter d’être sanctionnés.

De nouvelles règles à venir, donc. Et une bonne occasion, pour les représentants du personnel, de rappeler que le droit au repos… n’est pas négociable.